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Photo du rédacteurAlina Barlogeanu

La vision traditionnelle chinoise de la santé et de la maladie

Dernière mise à jour : 21 déc. 2023


champignons dans la forêt
La médecine traditionnelle chinoise suit les lois de la nature.

Je mentionnais dans un billet précédent que la médecine chinoise - en général - et l'acupuncture - en particulier - est avant tout une ethno-médecine. C'est un produit culturel qui a vu naissance il y a plusieurs millénaires, et son apogée (pour l'acupuncture classique) à l'époque des Han (-200 - 200 EC). Il s'ensuit donc que pour arriver à comprendre cette pratique ainsi que les possibilités qu'elle nous ouvre, on se doit d'abord de comprendre la culture qui l'a vu naître, sa vision du monde. J'aurais donc ici un point de vue "traditionnel".

Mais avant de continuer, je me dois de préciser que beaucoup de praticiens ne souscrivent pas à la vision que j'expose ici. Bien au contraire, certains acupuncteurs essayent d'effacer autant que faire se peut les différences d'avec la médecine occidentale - pour gagner en crédibilité, parce que leur champs de croyances ne permet pas un point de vue aussi différent, parce que le monde médical occidental rassure - et pratiquent souvent une médecine occidentale avec des aiguilles. Personnellement, je pense qu'il y a de la place pour tout le monde et que si cette façon de pratiquer permet au moins de limiter les symptômes et les médicaments (et donc leurs effets parfois néfastes), pourquoi pas après tout. Seulement, cet état de fait crée une confusion non seulement chez les non-avertis mais également chez les praticiens de cette discipline qui n'arrivent plus à faire la distinction entre ce qui est "traditionnel" et ce qui a été tellement modifié qu'il ne peut plus être considéré comme tel.

La médecine chinoise est une médecine résolument énergétique. Elle explique la façon dont le souffle de vie (qi/ prana/pneuma etc) anime le corps et entretient la vie. Elle explique qu'il y a un ordre qui va bien au vivant, et que si celui-ci n'est pas respecté, des problèmes s'ensuivent. L'acupuncture n'est ni plus ni moins que l'outil pour arriver à influencer ce flux, le débloquer si besoin, l'amener à circuler à des endroits desservis ou limiter sa circulation à des endroits ou il y en a trop. Car le postulat de base de cette médecine est que tant que ce souffle de vie circule et anime nos cellules, la vie perdure. Quand il est bloqué, rien ne va plus.

Quand un acupuncteur traditionnel pose une aiguille, ce n'est pas pour stimuler tel nerf, ou affecter tel métamère, ou stimuler les fascia ou pour la soupe chimique que la piqure engendre à l'endroit de la pose - combien même ces mécanismes entrent en jeu. Son seul but est de réguler la circulation énergétique. Et la décision quant au choix de méridiens, des points, de théorie à utiliser - est prise suite à des observations et des outils qui n'ont rien à voir avec la médecine occidentale.

L'acupuncteur traditionnel ne voudra jamais "traiter" une "maladie". Il ne le pourra pas d'ailleurs. Ceci est le paradigme propre de la médecine conventionnelle. Tout ce qui intéresse le praticien c'est la circulation énergétique dans les méridiens d'acupuncture qu'il ré-harmonisera grâce à ses outils propres. Une fois le flux remis en fonction, alors les symptômes peuvent disparaître. Mais cela n'est pas la conséquence d'avoir "travaillé sur la maladie (tendinite, migraine ou n'importe quoi d'autre)"!

Mais voilà le grand problème: le langage. Une personne qui consulte en acupuncture n'utilisera jamais un vocabulaire qui parle à son praticien, il ne dira jamais: j'ai un xu de xue, ou mon Jue Yin de pied est faible, je souffre de la sècheresse dans mon Yang Ming ou encore mon Yin de Gan est dans les chaussettes alors j'ai le Shao Yang de pied qui monte dans les tours! Non, il utilisera le plus souvent une terminologie à l'occidentale: sciatique, reflux gastrique, entorse, endométriose etc.

L'acupuncteur traditionnel n'a que faire de ces labels. Il ne les comprend pas, c'est du chinois! Donc il devra poser beaucoup de questions pour arriver à traduire en termes énergétiques le déséquilibre dont souffre la personne. Il ne traite pas des maladies, il s'occupe du terrain. Même quand il emploie des termes comme le Foie, la Rate, le Rein pour avoir l'impression d'avoir un terrain commun avec la personne en face de lui, il lui faut s'expliquer aussitôt en précisant qu'il parle surtout de certaines fonctions que l'on traduit sous l'appellation de "foie" mais qu'en réalité on n'entend pas la même chose par là qu'en médecine conventionnelle.

La médecine occidentale a des années lumière d'avance sur la médecine chinoise quant au fonctionnement bio-chimique du corps humain. C'est la raison pour laquelle, juger la médecine chinoise à travers ce prisme là, est non seulement inutile (car on n'a jamais prétendu se comparer à cela) mais insensée. Cela parle plus de l'ignorance (inadmissible à notre époque) de celui qui s'y emploie.

Non, il faut célébrer nos différences. Il faut comprendre la médecine chinoise sur son propre terrain sans essayer de lui faire singer la médecine occidentale, car ce faisant, on finit avec une version simpliste de la dernière et une zombification de la première. Pour que la médecine chinoise puisse représenter une "alternative", pour que l'on puisse jouir des possibilités qu'elle recèle, il faut lui laisser ses caractéristiques.

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